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  • ricardosalvador2

Cheeta ne fera plus le singe...

Cheeta, la guenon qui a accompagné ma prime jeunesse et celle de tant d’autres mouflets est partie au royaume des bananiers éternels, d’un bond phénoménal, passant d’une liane à une autre elle s’en est allée retrouver Johnny Weissmuller, incomparable Tarzan, 1er homme-singe cathodique aux muscles saillants et au brushing sans huile de palme.

Quand j’étais môme, je ne rêvais que d’une chose, faire comme lui : me balancer de liane en liane, courir pieds nus dans la jungle, parler le Chimpanzé et défoncer le plexus des filles en leur disant ‘ Toi, Jane’. Bref, je voulais faire roi de la jungle !

Je ne pensais qu’à ça, ça m’obsédait. Je m’entrainais à pousser le cri de Tarzan dans ma chambre et ma mère arrivait, paniquée, se demandant dans quelle prise électrique j’avais fourré mes doigts. En sixième, j’ai choisi chimpanzé première langue, on m’a dit que ce n’était pas possible, alors j’ai pris gibbon, puis gorille, puis orang-outan, mais à chaque fois ils ont refusé.

Alors j’ai pris anglais, la mort dans l’âme, et comme prévu, ça ne m’a servi à rien.

Je voulais habiter cette Afrique mystérieuse où les terribles colonies de fourmis géantes dévoraient tout  pour ne laisser que quelques squelettes blanchis après leur passage, où les anthropophages aux dents aiguisées, aux danses extatiques vous donnaient en pâture à leurs Dieux Serpents, à leurs Totems Crocodiles, où les fleuves sombres charriaient des monceaux d’émeraudes et de diamants, où les monstrueuses araignées aux toiles gigantesques vous guettaient dans la pénombre, où les crocodiles, cachés dans les buissons, imitaient les pleurs des bébés pour vous attirer et vous emporter dans leurs tanières qui leur servaient de garde-manger.

L’Afrique, territoire vierge et inexploré, peuplé de cris, de mugissements, de rugissements, d’oiseaux multicolores, d’animaux imaginaires, des boas gros comme des arbres, des scorpions gros comme des chiens, des panthères noires dont les yeux éclairaient la nuit de la jungle, des insectes inouïs infestant des baobabs gigantesques dont la cime se perdait dans une mer de nuages, les mystérieuses montagnes interdites et inaccessibles de M’Bala Ounga où parait-il subsistait des peuplades préhistoriques d’une race inconnue que personne n’avait jamais vue mais dont les hommes mesuraient trois pieds de haut et portaient tous une massue ornée d’un crâne humain.

L’Afrique où dans le lointain retentissait le cri terrifiant de Tarzan, l’homme blanc, le Taboo-djuk-djuk. ‘Ca pas bon bwana, ça Taboo djuk-djuk, Ungawa ! Ungawa ! '

C’était l’Afrique d’avant, la seule, la vraie, celle d’Akim, de Zembla, de Tarzan, une Afrique où, avec un peu de bol ( il suffisait d’avoir un accident d’avion et d’être adopté par les singes) on pouvait devenir roi des animaux et régner sur la savane et la jungle.

J’avais de l’ambition moi ! Mais on a voulu me décourager, on m’a dit, c’est pas tout à fait comme ça, la réalité est différente. Alors j’y suis allé. J’ai pas vu de cimetières d’éléphants, mais des cimetières de voitures, les fleuves charrient des trucs à la surface mais ça ne doit pas être des émeraudes, il reste quelques animaux sauvages, mais les gardes vous virent à coups de crosse quand vous essayez de pousser votre fameux cri pour montrer que vous êtes de retour, et de toute façon, les lions ont l’air de s’en foutre.

Alors, pour me coonsoler, je me suis repassé le premier Tarzan en DVD, Cheeta était fringante et espiègle mais le film a pris un petit coup de vieux.

Je crois que moi aussi.

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